« Je tiens à exprimer mes plus profonds regrets… » C’est ainsi que Philippe de Belgique a débuté son discours d’excuse et de repentance pour la colonisation du Congo débutée par son ancêtre en 1885, le roi Léopold II, ajoutant ainsi sa contribution au révisionnisme historique ambiant.
Un genou à terre
Outre le fait que notre souverain déshonore son nom et son ancêtre, il nous prouve là toute sa méconnaissance de l’Histoire. Ou alors, et ce serait pire, il connaît très bien le sens de l’aventure congolaise mais se plie aux diktats de la doxa du moment, nous montrant ainsi qu’il est dénué de courage. Dans un cas comme dans l’autre, cela prouve qu’il n’a pas les épaules pour assurer la fonction. Un roi doit démontrer une stature et une vision. Tel un capitaine de navire, il doit savoir garder le cap même lorsque la tempête fait rage et que les matelots perdent la tête. Ici, Philippe a rejoint le camp des matelots affolés.
Mais rassurez-vous, il avait très probablement tâté le terrain auprès du gouvernement (en affaires courantes et ultra-minoritaire) et consulté la Première Ministre Sophie Wilmès. De celle-ci, on retiendra qu’elle n’a pas hésité à baisser le niveau jusqu’à nous produire une discours pétri de repentance de bazar, posant ainsi un genou à terre pour son « discours » -appelons ça ainsi- de commémoration du 60e anniversaire de l’indépendance du Congo.
Au passage, jetons un regard critique sur le Congo indépendant, pays immensément riche de ses matières premières qui a réussi en soixante ans cette incroyable contre-performance de truster une enviable pole position au bout de l’aventure belge pour devenir une plaie béante en termes de développement économique. Faut-il aussi passer sous silence les guerres successives qui ravagent le Kivu sur fond de pillage des ressources?
Peu importe, pour Béatrice Delvaux, éditorialiste en chef au journal Le Soir, qui salue « enfin ce geste si nécessaire, qui grandit le Roi et son pays ». La RTBF n’est pas en reste puisque, dans un retournement de veste hallucinant, elle modifiera le contenu d’un de ses articles pour censurer la parole des Congolais et la conformer au discours ambiant.
Quid des apports belges au Congo ?
Pas un mot n’est pipé sur les apports des Belges aux Congolais tels que les infrastructures, les écoles, les soins de santé, les hôpitaux, la police, la justice et le droit. Aucune référence à l’action bénéfique de Léopold II qui permit aux Congolais de dépasser des divisions sur fond de tribalisme multiséculaire pour former une Nation qui mettra fin aux guerres intestines et aux razzias orchestrées par les Arabes qui écumaient la région depuis le 8e siècle (souvent avec la contribution active de chefs tribaux africains). Au fait, les Arabes devront-ils aussi dédommager les Congolais pour ça ?
Même Patrice Lumumba, premier Premier Ministre de la République démocratique du Congo en 1960, tenait un discours plus nuancé, reconnaissant des apports positifs de la colonisation belge tout en lui attribuant des maux et des déboires.
Aujourd’hui, nous subissons le discours du procureur qui n’instruirait qu’à charge de la Belgique. L’acte accusatoire est lu et il n’est pas question d’en débattre. On comprend vite le dégoût vis-à-vis de la nuance pour certains.
On pourrait également peser le pour et le contre et comprendre que, pour des intellectuels congolais, comme Jean-Pierre Nzeza Kabu Zex Kongo, l’action de Léopold II et de la Belgique fut globalement bénéfique tout en n’occultant rien des maux passés. On pourrait aussi se pencher sur les sombres manœuvres des gouvernements britannique et français après la Conférence de Berlin en 1885 qui, furieux de s’être fait damer le pion par le souverain d’un si petit pays comme la Belgique, n’auront de cesse de créer et répandre le mythe du génocide congolais et de la pratique de la main coupée.
Selon Zex Kongo, Léopold II était responsable mais pas coupable (il reprend ici la célèbre formule de Laurent Fabius). D’ailleurs, c’est le souverain lui-même qui, lorsqu’il eut vent des exactions commises par des Belges au Congo, mit la pression sur le gouvernement pour adopter des lois protégeant les populations autochtones. On enseigne cela à nos jeunes têtes blondes de nos jours ? J’en doute fort…
Le « race business »
Aujourd’hui, l’antiracisme est un business, voire un secteur économique à part entière. Grâce à de généreux subsides distribués à une myriade d’acteurs associatifs, il offre de belles carrières à nos indigénistes et ethno-racialistes revanchards. C’est donc aussi sans surprise une manière habile pour le politique d’accroître – ce qu’il imagine être – son emprise sur les minorités dont la liberté de parole est elle aussi de plus en plus bafouée puisque leurs représentants ne sont autorisés à exprimer que ce qui va dans le sens du vent.
En attendant, cela donne tout le loisir à moult associations qui sous couvert d’antiracisme oeuvrent activement à la fragmentation de notre société notamment en tenant une comptabilité précise du montant des réparations que la Belgique devrait payer au Congolais, avec calcul des intérêts en temps réel!
Il n’aura échappé à personne que cette stratégie qui consiste à demander une réparation financière amène à assimiler la colonisation à la Shoah. Cette démarche n’est pas dénuée de révisionnisme car en jouant de cette analogie, elle ôte à « la solution finale » toute la dimension singulière du génocide dont les Juifs ont été victime. Nous voilà face à une négation de l’Histoire, à laquelle on peut ajouter dans le chef de nos indigénistes une horrible dose de machiavélisme. S’il est en effet difficile d’imaginer quel fut l’apport positif des nazis vis-à-vis des Juifs, personne ne pourra oublier les infrastructures et les institutions dont les Belges ont doté le Congo. S’il est évident et historiquement démontré qu’un génocide a eu lieu sur le peuple juif par les nazis, il n’en est rien quant aux Belges vis-à-vis des Congolais (à nouveau, voir le lien vers l’ouvrage de Nzeza Kabu Zex Kongo ci-dessus).
La définition d’un génocide est la volonté institutionnalisée d’une autorité centrale d’exterminer un peuple par des moyens opérationnels évidents. Une telle accusation dans le cas congolais est ridicule et mensongère. Mais la stratégie est perfide et bien rodée. Et le déchaînement anti-belge actuel n’aide pas à la mise en place d’un climat serein propice au débat contradictoire. Le but ultime devrait être celui de faire la paix, avec nous-mêmes et avec les Congolais. A la place, nous aurons une énième commission d’experts sur la question…
Avec la facture Covid, le paiement des pensions et le coût de la dette publique, l’ardoise va être lourde si on y ajoute la facture congolaise, toute infondée que soit cette dernière! Nous vivons une bien triste époque avec, sur le trône, un bien triste sire.
Jules Alove
P.S. : C’est pas de la haine, c’est du détachement.