RTL-TVI : les ondes sont brouillées

1470

En Wallonie, on n’a pas beaucoup de sous mais on a des idées, surtout quand il s’agit d’utiliser l’argent d’autrui. Jadis terre d’entreprenariat et d’innovation (on parle de la deuxième moitié du 19e siècle), après soixante ans de socialisme d’après-guerre cette région est désormais transformée en une zone sinistrée, plongeant au passage un grand nombre de ses habitants dans l’assistanat et la précarité. Face à l’adversité, ces derniers tendent à se tourner vers les aides d’Etat plutôt que de se retrousser les manches. Mais peut-on vraiment les blâmer? Entre une culture qui méprise le libre marché et un analphabétisme économique criant, sans parler d’une fiscalité ahurissante, la Wallonie ne tient ses quelques success stories qu’à des filiations et accointances au sein de ses nombreux organes publics à la main-d’œuvre pléthorique.

Rouge parrainage

Un peu comme la Chine et son système de ganxi (une sorte de « parrain » au sein du Parti Communiste Chinois qui vous permet d’obtenir autorisations, passe-droits, privilèges et crédits), vous n’arriverez nulle part si vous n’êtes pas coopté par un ou plusieurs gentils parrains rouges. Non pas que ces gens éprouvent la moindre sympathie et adhèrent formellement au socialisme, ils sont dénués d’idéologie et c’est l’opportunisme qui les motive. Mais c’est au sein du parti à la rose (fanée) qu’ils ont trouvé le terrain le plus favorable pour exercer leur monopole du cœur (de pierre). 

D’ailleurs, de communisme il en ouvertement question depuis Pierre Wunsch, économiste chevronné et actuel Gouverneur de la Banque Nationale de Belgique, estime le ratio dépenses publiques vs PIB de la Wallonie à hauteur à 70%. Certes nous ne sommes pas à Cuba et encore moins en Corée du Nord. Néanmoins, la Sud du pays est sur une pente savonneuse, celle du collectivisme et de sa servitude subséquente. La Wallonie n’est donc plus cet eldorado qui attira jadis le génial John Cockerill et autres entrepreneurs.  

Et l’offre de médias ?

Ici, zéro surprise. Tout oscille entre le centre-gauche et l’extrême-gauche. No pasaran ! Le stagiaire ou la jeune recrue qui aura l’audace d’exprimer une opinion écrite non conforme à la doxa gauchiste, si par miracle elle passe entre les mailles du filet, se verra rapidement enjoint de rentrer dans le rang (ou de quitter la rédaction). Il y a ça et là quelques diffusions dissidentes mais leur portée est somme toute marginale et restreinte.

Niveau télévision, on a l’impression de se retrouver pongé dans une Allemagne de l’Est jadis à la botte de Moscou tellement l’offre est restreinte. Entre les petites chaînes régionales subventionnées et détenues généralement par des intercommunales au conseil d’administration ultra-politisé et les deux chaînes « nationales », c’est le désert.

D’un côté, on a le service public et sa Radio-Télévision Belge de la Communauté Française (RTBF), première chaîne publique francophone. Son penchant à gauche est tel qu’il supplante celui de la fameuse tour de Pise! D’ailleurs, son administrateur-délégué, Jean-Paul Philippot, est un bon soldat made in PS qui, de 1989 à 1995, officia en tant que chef de cabinet adjoint du ministre-président de la Région de Bruxelles-Capitale, Charles Picqué (PS) à l’époque. Si le Conseil d’Administration de la RTBF comporte en effet un représentant MR en la personne de l’ultra socialo-compatible Jean-Philippe Rousseau, le reste oscille entre le gros rouge qui tache et le rouge vif (avec un note de vert qui, à l’image de la pastèque…).

De l’autre côté, on a RTL-TVI, chaîne privée et filiale de RTL Group, qui diffuse sur les ondes belges bien que son siège soit situé au Luxembourg. On pourrait croire que RTL-TVI donne le change mais c’est sans compter sur son administrateur-délégué, Philippe Delusinne, un -très- proche d’Elio di Rupo dont il a en son temps rédigé les discours.  Les moutons sont donc bien gardés. Pour sauver les apparences, la chaîne avait un temps fait appel à Emmanuelle Praet pour donner l’illusion d’une représentation de la droite sur la chaîne mais la mystification s’acheva en 2019 quand la chroniqueuse dissidente fut remerciée suite à sa sortie (son dérapage, pour employer le terme consacré) au sujet d’Ecolo et de son programme fiscal. Pendant ce temps, Michel Henrion peut continuer à exprimer son virulent racisme anti-flamand sur le plateau en toute décomplexion, sans craindre le moindre limogeage. Chez RTL-TVI, le pluralisme des opinions s’exerce en mode mineur…

Vos émotions en grand

Si la saga RTL-TVI commence en 1987, son discours reste d’un conformisme ne rivalisant qu’avec celui de sa rivale publique, au point que son audience globale passera de 30% au début des années 1990 à moins de 20% en 2020. Certes, le monde s’est globalisé et la révolution internet a produit ses effets dans l’intervalle, offrant avec ses réseaux sociaux et plateformes d’autres médias qui s’attireront les faveurs des auditeurs.

On ne peut toutefois pas nier que cette baisse d’audience est en rapport avec la qualité de son offre de programmes mais surtout la diversité de ses opinions. On peut berner une fois l’auditeur, mais on ne peut éternellement jouer avec ses pieds et ses émotions. D’ailleurs, partant de son fameux slogan « vos émotions en grand », il est probable que le dégoût et la désillusion soient désormais les sentiments les plus présents chez les auditeurs. Au final, serait-ce la raison qui l’emporte sur l’émotion ?

Crise du pluralisme ou du coronavirus ?

Le Covid-19 a frappé tous les secteurs. Les médias n’y ont pas échappé avec l’assèchement de leurs recettes publicitaires, les entreprises ayant revu nettement à la baisse ce type de dépenses. C’est ainsi que RTL-TVL s’est vu privé de 30 millions d’euros de revenus cette année. Toutefois, ce n’est pas le premier revers de fortune que la chaîne essuie. Déjà en 2017, elle annonçait le licenciement de 105 personnes,  ce qui se soldera finalement par 88 départs en mars 2018.

Certes, le coût du travail et la fiscalité sont exorbitants en Belgique. Néanmoins, on ne peut s’empêcher de penser que les déboires de RTL-TVI sont aussi la conséquence de ses choix éditoriaux et de son manque de pluralisme. Trop de téléspectateurs ne s’y retrouvent plus.

La FWB à la rescousse

Crise du coronavirus aidant, après quelques appels du pied et signaux de sioux, son administrateur-délégué franchit le Rubicon et demande explicitement l’aide financière de la Fédération Wallonie-Bruxelles (où le PS est tout puissant) à hauteur de 30 millions d’euros. Trop heureuse de jouer les chevaliers blancs et de s’offrir une nouvelle caisse de résonance aux frais du contribuable, la FWB bondit sur l’occasion et met la main au portefeuille pour sauver le bateau RTL-TVI en plein naufrage même si ses finances sont dans le rouge vif, saignant plus fort que le coeur d’Elio Di Rupo. On notera au passage que RTL Group a généré un bénéfice net de 864 millions d’euros pour l’exercice 2019. Les pertes sont donc nationalisées (ou plutôt régionalisées en l’occurence) tandis que les bénéfices demeurent bien privés. Les ondes sont brouillées.

Maintenant que RTL-TVI tombe dans le giron de la FWB, on peut s’attendre à une copie carbone de la RTBF pour les années à venir, le coût en sus.

Promener le chien

En Allemagne de l’Est, sous le régime soviétique, il y avait une expression courante qui circulait parmi le peuple : promener le chien. Les quelques chaînes nationales diffusaient la propagande de Moscou et vantaient les gloires du socialisme en continu pendant que les gens étaient confrontés à une toute autre réalité sur le terrain. Lors du journal télévisé du soir, non sans une pointe d’ironie, le quidam disait alors qu’il sortait le chien, histoire d’exprimer sa dissidence avec humour.

De ce pas, je file adopter un chien.

Jules Alove