A Marseille, son quai des Belges. A Bruxelles, ses fusillades à la marseillaise. Longtemps épargnée par la visibilité du marché de la drogue, la capitale belge s’embrase dans une guerre des gangs qui se mitraillent en pleine rue. Anderlecht, Bruxelles, Saint-Gilles, Schaerbeek… et autant de bourgmestres qui réalisent doucement qu’ils ont perdu le contrôle de leur commune. Est-ce réellement une fatalité ou le résultat prévisible de trente années de laxisme tous azimuts ?
Cherche Procureur du Roi désespérément
N’importe quel policier sur le terrain confirmera que rien n’est fait pour endiguer ce fléau. En Belgique, les paroles ne sont jamais suivies d’effet, même politique. Notre forme de mal gouvernance qui consiste à entretenir une invraisemblable clique où l’irresponsabilité se fond dans la masse des élus contribuent à amplifier tous nos dysfonctionnements. A vrai dire, notre classe politique, pas vraiment « partageuse » en matière de pouvoir, n’a probablement jamais eu pour dessein de se faire challenger par une pègre qui pèse des dizaines de milliards, 55 milliards d’euros annuels pour le seul trafic de cocaïne. En attendant, Bruxelles attend désespérément depuis 2021 la nomination de son Procureur du Roi.
Nos élus qui se déplacent en voiture électrique avec chauffeurs aux frais du contribuable sont tristement ridicules face à des barons de la drogue en Lamborghini. A vrai dire, même le petit « chouffeur » qui dès dix ans peut empocher 3000€ net d’impôt pour faire la vigie assis sur sa chaise de jardin au bas de son logement social déclasse pas mal d’élus !
Tout cela n’est pas neuf. C’est juste que l’ampleur du phénomène et l’énormité du gâteau ont fini par attirer de plus en plus d’acteurs criminels. Ceux-ci défendent de plus en plus âprement leur bout de gras. Pourquoi avoir fermé les yeux si longtemps ? Si nos élus sont prêts à s’attaquer aux braves gens qui tentent d’arrondir leurs fins de mois en taxant la moindre transaction sur Vinted, 2emain, Leboncoin, ou RbnB, il n’a jamais été question de retirer le fruit de l’économie de la drogue qui irrigue de nombreux quartiers. Certains représentants ont certainement dû y voir l’occasion de financer de façon indolore des zones très, très, gourmandes en coûteuses politiques d’inclusion. En France, on estime que l’Etat a investi plus de 100 milliards dans ses banlieues depuis 1977. En Belgique, notre budget saigne avec autant de vigueur. Entre les contrats de sécurité et l’arrosage du milieu associatif inclusif, que de milliards investis dans l’enracinement du marché de la drogue.
Parmi les décideurs il y a ceux qui feignent de ne pas comprendre, la majorité qui s’en fiche et ceux qui s’affichent ouvertement antiprohibitionnistes par militantisme. Avec tout ça, il est difficile de soutenir que notre société soit mue par la volonté d’affronter le problème. Après trente années de grand déni durant lesquelles tout a été fait pour faciliter l’implantation du marché de la drogue et que celle-ci est désormais présente de l’école, aux sorties en passant par le milieu du travail, on voudrait nous faire croire qu’il faudrait lâcher les dernières digues pour s’attaquer à ce fléau. Et quel fléau ! A la destruction des vies, on peut ajouter celle de l’économie et celle de la démocratie. Les milliards que draine cette économie sont détournés de la consommation de biens et de services et génèrent, en plus, d’énormes dépenses en matière de sécurité, santé publique, dommages aux biens et aux personnes,…). Quant à la démocratie, elle croule sous le poids de cet argent qui pèse de plus en plus lourdement sur les élus. A mesure que les balles claquent, la peur s’empare du monde politique. Même les plus accommodants se sentent dans le viseur. Soudain, la perspective de devoir rendre des comptes à plus fort qu’eux devient réelle. Et c’est autre chose que de balader l’électeur. On ne badine pas avec les kalachnikovs. D’autant qu’elles sont le plus souvent entre les mains de mineurs (dont des MENA). Rien ne les arrête et certainement pas un arsenal pénal d’une clémence sans borne pour cette catégorie.
Le répressif permissif en sous-effectif
A mesure que la violence se déchaîne du côté des dealers, donc du côté de l’offre, le combat semble perdu. Effectivement, si on se place exclusivement sur ce segment du marché, tout semble écrit.
Avant de résolument baisser les bras (comme le propose bon nombre de nos élus) et de livrer notre population à la libéralisation des drogues qui fera sauter tous les verrous du contrôle social, pourquoi ne pas s’attaquer à l’autre composante du marché, la demande ? Pourquoi ne pas abandonner la demi-répression ? Accuser d’inefficacité le répressif quand il est pratiqué avec permissivité et en sous-effectif relève de la pire mauvaise foi.
Au fil du temps, la cible de notre politique répressive n’a fait que s’étioler. La justice s’est montrée de plus en plus compréhensive vis-à-vis du consommateur, puis du petit dealer, puis du dealer de drogues dites douces en proposant une dépénalisation de fait pour en arriver à proposer légalement la drogue pour tous ? Voilà trente ans que cela dure et que cela ne marche pas. Pourquoi encore continuer dans la mauvaise direction ? Par lâcheté ? Par cupidité parce qu’il y a des milliards de taxes en perspective ? En plus, il est illusoire de croire que le marché va rester inactif une fois que l’Etat reprendrait la main. Au contraire, on pourrait assister à un véritablement déchaînement de concurrence sur base de produits encore inconnus. L’histoire de la toxicomanie est un peu une longue succession de découvertes de substituts chaque fois plus nocifs que la substance à remplacer.
Rétablir le champ du répressif dans le chef du consommateur, même occasionnel, c’est peut-être notre dernière cartouche contre les tirs de kalachnikovs.
T.H.