La situation de la Belgique a toujours été un peu particulière. Petit pays à forte densité de population, deuxième bénéficiaire du « take-off » de la révolution industrielle après l’Angleterre, la Belgique avait tout pour réussir. État-tampon entre la France, les Pays-Bas et l’Allemagne, fruit des guerres napoléoniennes, cette petite nation a de nombreux avantages à commencer par une population relativement bien formée.
Mais qu’en est-il aujourd’hui ?
On ne va tourner autour du pot. La situation économique de la Belgique est catastrophique. Nous sommes revenus trente ans en arrière. Certes les niveaux de vie ont évolué positivement dans l’intervalle, soyons honnêtes. Mais les finances de l’État sont complètement plombées. Le déficit budgétaire atteindra les 45 milliards d’euros d’ici la fin de l’année, soit près de 10 % du PIB. D’ailleurs, la croissance économique mesurée en termes de croissance du PIB sera de l’ordre de −9% selon les projections de la Banque Nationale de Belgique. Et cela reste assez optimiste…
Si le chômage, alors qu’il avait connu un trend baissier sur les quatre dernières années, va augmenter et dépasser les 8 %, il faut également tenir compte des disparités Nord-Sud où la Wallonie et Bruxelles vont encore se positionner en lanterne rouge. Qui peut encore s’étonner du score tonitruant du Vlaams Belang à ce jour ? La fracture Nord-Sud ne fera que s’accentuer et pas seulement en termes économiques mais aussi en termes culturels.
Bref, ça va mal. Le taux d’endettement du pays, avant le coronavirus et le confinement subséquent, était de l’ordre de 100% du PIB. Révision faite de ses calculs, le département des analyses économiques de la BNB ne peut que constater que celui-ci atteindra 120% fin 2020. À ce stade, on n’a pas encore pris en compte une deuxième vague et un deuxième confinement pour information. Également, les faillites en chaîne et autres débâcles économiques personnelles ne sont pas encore pleinement intégrées dans les chiffres.
Mais on parle de reprise économique…
Certes, il faut bien que ça redémarre et c’est le cas avec le déconfinement. Mais notre vieille économie plombée par ses niveaux de taxation et son coût du travail exorbitant, sans parler de son code du travail et de ses lois ubuesques, ne va pas redémarrer en trombe. Si les économies anglo-saxonnes, à commencer par les États-Unis, sont connues pour être plus volatiles, la nôtre, en raison de son modèle redistributif et taxatoire, est beaucoup plus lente à reprendre et à décoller. Donc, si tout va bien – ou plutôt toutes choses étant égales par ailleurs, comme le disent si bien les économistes — on devrait retrouver des niveaux de production industrielle et de croissance économique similaires aux alentours du 2e semestre de l’année 2022 seulement.
Pris globalement, les revenus des ménages connaissent une très légère baisse mais cela est dû à deux facteurs :
1. La redistribution : on taxe les uns pour redonner aux autres.
2. Le recours à l’endettement public : on emprunte sur les marchés financiers pour arroser le peuple avec de l’argent qu’on ne possède pas.
En effet, La Banque Centrale Européenne, dans sa grande mansuétude (ironie), se positionne en primo-souscripteur de tout emprunt d’État belge, à hauteur de 45% environ, en imprimant de la monnaie ex nihilo. C’est énorme, ce qui contribue à faire baisser notre taux d’emprunt et de facto le coût de la dette à terme. D’ailleurs, à ce jour, contre toutes attentes – en fait sous l’action de la BCE -, le taux de rendement actuariel de l’OLO belge à 10 ans est de -0,07%. Il est donc négatif, ce qui est une double anomalie car un taux d’intérêt ne peut jamais être négatif, le futur étant plus incertain que le présent, et les finances du pays sont en plein état de détérioration, voire de délitement. C’est une fuite en avant.
En termes d’exportations, notre petit pays jouit d’une position assez avantageuse, car il est adossé à la puissante locomotive allemande. Mais, de nouveau, la BNB est assez pessimiste quant au niveau de reprise des exportations belges. Il va falloir du temps et de la patience, mais surtout du travail. Bref, ce sera long et douloureux.
Mais que va-t-il se passer ?
Eh bien, ce n’est pas très compliqué. La pression fiscale et sociale va augmenter, ce qui rendra la reprise encore plus difficile. De plus, la tentation est grande pour le gouvernement de taxer les livrets d’épargne en Belgique dont le niveau dépasse les 285 milliards d’euros à ce jour. Avec l’encours des comptes courants, on atteint les 320 milliards d’euros. Il faut remarquer au passage que le confinement a incité les Belges à épargner encore plus, en fait par quasi-absence de possibilité de consommation. D’ailleurs, nos compatriotes sont connus pour leur capacité à mettre de côté pour les mauvais jours. Les petites fourmis, en plus de devoir travailler très dur, vont être sollicitées par les cigales qui nous servent de dirigeants politiques. On parle également d’une micro-taxe Tobin (du style 0.1%) sur tous les flux monétaires. En fait, ça revient à augmenter la TVA et même à l’appliquer à des flux sans valeur ajoutée comme un virement à votre gamin pour ses étrennes ou encore son argent de poche.
L’imagination est au pouvoir, paraît-il. Le mur de la réalité va nous remettre les idées en place.
Jules Alove