
France et Belgique bataillent pour s’accorder sur un budget et éviter de se prendre de face le mur de la dette. Mais ce n’est pas un nouveau budget qui sortira nos deux champions de l’endettement du couloir de la mort. Ce ne sont pas les calculs qu’il faut modifier parce que c’est d’équation qu’il faut changer. Voilà ce que nous apprend la spectaculaire victoire de Milei à mi-mandat.
Du travail au servage
En France, 10% des foyers fiscaux contribuent à 70% de l’impôt sur le revenu.
En France, 56% des foyers fiscaux ne paient pas d’impôts sur le revenu.
En France, 57% des foyers fiscaux reçoivent plus de l’Etat qu’ils n’y contribuent.
Voilà les chiffres affichés ce 27 octobre sur le plateau de LCI pour planter le décor du débat sur la taxe Zucman. Ils sont effrayants et sans prendre le risque de commettre de grosse erreur, on peut les transposer à la Belgique, autre champion du prélèvement
Voici le commentaire réaliste qu’en a fait une chroniqueuse lucide sur le plateau de LCI :
« On fonctionne à l’envers (…) On en train de se demander où est l’impôt et on refuse de se demander où doivent être les économies du train de vie de l’Etat et de la redistribution. Ca ne peut pas marcher. On est dans un moment complètement délirant où on est en train de se rendre compte que le travail ne paie pas mais qu’il faut prélever toujours plus pour compenser le fait que le travail ne paie pas. (…) ».
Et dans le même temps, les partenaires de majorité se livrent à des petits jeux politiciens dont le but est de faire croire que l’on s’attaque au totem de l’adversaire en prenant garde de ne surtout pas ébranler l’édifice, tout bancal et endetté qu’il soit, puisque c’est lui qui nourrit toutes les formations politiques et leurs innombrables relais médiatiques et associatifs.
A vrai dire, c’est une parfaite application de l’« en-même-temps » : donner l’illusion du changement tout en s’assurant de maintenir la parfaite continuité du système. Dans ce jeu de dupes, les élus de tel bord vont cibler un petit segment de l’électorat de l’adversaire, par exemple les « chômeurs ». En retour, les élus de l’autre bord s’en prendront aux « ultra-riches ». Ca tombe bien, il n’y en a pas beaucoup et donc, électoralement, ils ne pèsent rien. En réalité le poids politique des ultra-riches est inversement proportionnel à leur richesse. Bien sûr, les négociateurs mettront un peu de formes, ils bomberont le torse mais se garderont bien de prendre les véritables décisions disruptives qu’il conviendrait de mettre en œuvre.
Lorsque l’ombre du FMI se profile, il n’est plus question de mesures symboliques et d’égratignure de totems. Il faut tailler à la fois dans le gras mais aussi dans l’injuste. En effet, si les institutions supranationales peuvent être tentées de se montrer sévères, le peuple lui aussi peut être tenté de montrer les dents. Toute dette, implique un appauvrissement et donc des victimes. Il est essentiel d’identifier celui qui sera appauvri par les nouvelles taxes et de veiller à ce qu’il ne soit pas le seul à porter le nouveau fardeau. Or les petites joutes politiques atour du budget auxquelles nous assistons indiquent tout le contraire : elles reposent sur des boucs-émissaires ; elles sont symboliques ; elles creusent les injustices.
Est-il légitime de sacrifier un chômeur de longue-durée sans toucher aux avantages d’un fonctionnaires en poste à la RTBF ou à l’allocation de logement pour les ministres ? Est-il légitime de pousser jusqu’au maximum le prélèvement d’un « riche » pour offrir des nuitées d’hôtel à des centaines de migrants ? Est-ce bien utile de ramener un malade de longue durée à l’emploi alors que des milliards sont déversés pour subsidier des emplois qui n’existeraient pas si le contribuable ne prenait pas en charge 70% de la masse salariale ? A ce tarif, un chômeur coûte moins cher à la collectivité. Mais le narratif est moins glamour. Et puis socialement le concept est difficilement acceptable. Mais gardons toujours en tête que le chômage résulte principalement de l’excès de taxes qui le rend le travail « non rentable ». C’est ce qui pousse ceux qui travaillent pour trois fois rien à ne plus travailler et ceux qui sont mieux rémunérés à freiner leurs efforts pour ne pas passer dans une tranche d’imposition supérieure. Plus triste encore, l’hostilité fiscale conduit les éléments les plus prometteurs à s’exiler pour espérer échapper à des conditions de vie qui relèvent d’une forme de servage. On notera aussi que parmi les chômeurs exclus du chômage en Belgique, 60% sont des étrangers, révélant ainsi combien le modèle redistributif belge s’avère mal calibré.
Dans ce contexte, faire des économies sur le train de vie de l’Etat devient une urgence pour réellement redresser les finances publiques et faire porter cet effort sur l’ensemble de la population. Ce dernier point, bien qu’essentiel, est soigneusement écarté des débats. Pourtant, il s’agit d’un élément constitutif du consentement à l’impôt. Savoir que les efforts sont partagés par tous les rend plus acceptables. Malheureusement, les chiffres prouvent que la volonté est d’épargner de larges pans de la population, surtout ceux capables de se mobiliser de la façon la plus efficace et structurée. S’attaquer aux plus démunis, les plus pauvres, et aux moins nombreux, les plus riches, c’est choisir la voie de l’inefficacité, et de la lâcheté aussi.
Pourtant, de demi-mesures en demi-mesures, la situation n’en finit pas de se dégrader. A vrai dire, nous dansons au bord du volcan. Tout le monde sait que la situation est explosive et que tôt ou tard, nous serons confrontés à un cataclysme économique qui dispose d’un potentiel à dégénérer en guerre civile. Notre classe politique mue par un mélange de stupidité et de manque de courage ne parvient pas à changer de cap et nous conduit droit dans le mur de la dette avec pertes et fracas.
Pourtant, un autre destin est possible. C’est ce que nous prouve aujourd’hui l’Argentine. Au grand dam de la presse occidentale et à la surprise de ses innombrables contempteurs, Javier Miliei vient de remporter très largement les élections de mi-mandat. Peu y croyaient. Sa violente tabula rasa infligée à coup de tronçonneuse avait tout pour dégoûter son peuple. Et pourtant, celui-ci a compris le bien-fondé des sacrifices qui lui étaient demandés. Les Argentins ont accepté de plonger dans les privations et l’inconnu parce que le programme qui leur était proposé leur est apparu comme la dernière chance à saisir avant le crash. Les exemples de dérives complètes malheureusement ne manquent pas : Haïti, Venezuela, Madagascar, … voilà autant de destinations, pour ne citer que celles-là, qui nous montrent clairement que le stade final de l’endettement et de la malgouvernance est aussi destructeur qu’une guerre, même en nombre de morts.
Milei : une tronçonneuse pour enfin s’attaquer au mammouth
Javier Milei nous prouve qu’il est possible d’emporter l’adhésion du peuple sans avoir à se corrompre dans des torrents de démagogie, sans avoir à redistribuer sous forme de pseudo-cadeaux glissés dans la poche de gauche l’argent qui vous est prélevé dans la poche de droite. Oui, en proposant un programme sensé, cohérent et porté par des convictions, il est possible de se faire élire même avec de lourds sacrifices pour seule promesse à court-terme. Cela demande du courage et de l’intelligence. C’est justement ce qui fait cruellement défaut à nos élus qui ne semblent incapables de proposer autre chose que des petits jeux politiciens et de coûteux emplâtres sur une économie qui ne subsiste que par la magie de l’emprunt. En Europe occidentale, la caste politique semble incapable de distinguer les dépenses des investissements puisque in fine l’argent qu’elle ponctionne au contribuable n’a d’autre finalité que d’assurer sa réélection par le truchement du saupoudrage d’éléments de dérégulation que sont les subsides, les aides et autres pansements. Pour la majeure partie des élus, toute dépense n’est jamais qu’un investissement dans son plan carrière.
Entre les indexations automatiques des salaires du personnel de l’UE, le mutisme des ministres belges qui se taisent dans toutes les langues nationales sur leurs choquantes allocations de logement et bien entendu l’incapacité généralisée des exécutifs à ne plus pouvoir accoucher d’un budget, la population ne manque pas d’arguments pour nourrir sa rancœur face aux sacrifices qui lui sont imposés, et tout cela sans aucune perspective de se sortir de la spirale taxatoire et de l’appauvrissement généralisé.
A l’inverse de ce qui se pratique en France comme en Belgique, le budget doit devenir le centre névralgique de la vie politique. Cela implique de lever les tabous derrière lesquels les formations politiques se retranchent si souvent pour ne jamais prendre de véritable décision autre que symbolique. Parce que s’en prendre aux chômeurs n’a aucun sens si on ne remet pas en question le statut de la fonction publique. Parce que s’en prendre aux invalides est injuste si on ne s’attaque pas aux milliards engloutis dans les politiques d’asile. Parce que réduire le budget des soins de santé est criminel si l’on refuse de toucher aux subsides irrigant une fonction publique bis constituée d’une galaxie d’ONG au service du personnel politique qui les lui octroie. Tout ceci doit être remis en question avec un véritable souci d’efficience.
On soulignera toutefois l’attitude singulière de l’actuel premier ministre belge, Bart De Wever qui a mis son maintien à la tête du gouvernement en jeu pour forcer l’adoption d’un budget. Coup de bluff, ou pas ? L’avenir nous le dira très vite.
En attendant, l’Argentine de Milei devrait nous servir de modèle et nous guider vers un électrochoc libérateur, une thérapie de choc sans tabou qui n’épargnerait personne pour profiter à l’ensemble. C’est à la tronçonneuse qu’il faut débiter le mammouth ! Afuera !
T.H.


