#HijabisFightBack : Pour en finir avec la fausse « neutralité »

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Petites filles en classe portant le hijab.
Photo de Akela Photography provenant de Pexels

Faisons tomber le masque de la fausse neutralité et osons dire clairement pourquoi nous ne voulons pas du hijab.

Dimanche après-midi, plus d’un millier de manifestants se sont rassemblés au Mont des Arts à Bruxelles pour protester contre l’arrêt de la Cour constitutionnelle donnant raison à la Haute école Francisco Ferrer dans le contentieux l’opposant à des étudiantes qui réclament le droit de porter le voile islamique au sein de l’établissement. Parmi les manifestants rassemblés sous la bannière « #HijabisFightBack Protest”, on comptait de nombreuses femmes voilées qui scandaient des slogans comme “Pas touche à mon foulard” et “Pas touche à mes études”.

Que l’on soutienne ou que l’on s’oppose aux étudiantes et militantes hijabis, chacun trouvera dans les derniers évènements des raisons de se réjouir ; pour les uns, de voir une « minorité » s’organiser pour lutter contre la « discrimination » ; pour les autres, de voir la Cour constitutionnelle défendre la « neutralité » supposée des établissements d’enseignement supérieur. Pourtant, quelle que soit notre opinion sur ce sujet, nous devrions tous nous attrister de la nullité et de l’hypocrisie des arguments entendus de part et d’autres.

Les hijabis contre la discrimination, tout contre

Commençons par dénoncer l’hypocrisie des hijabis qui récupèrent à leur compte et sans y croire la rhétorique de la lutte contre l’exclusion et la discrimination. En Belgique, aucune communauté n’est plus ouvertement exclusive et discriminante que la communauté des musulmans sunnites « orthodoxes » dont font partie les hijabis. Un non-musulman qui veut se marier avec une musulmane doit se convertir et donc montrer patte blanche à la communauté. À l’inverse, une non-musulmane qui veut se marier avec un musulman peut conserver sa religion, mais les enfants issus de ce mariage seront immédiatement reconnus comme musulmans. Qu’ils mangent de la nourriture halal ou qu’ils achètent des vêtements modest fashion, les musulmans de strictes observance cherchent par tous les moyens à se distinguer du commun des mécréants. Cette séparation se poursuit jusque dans le cimetière, où les musulmans orthodoxes demandent à être enterrés séparément des « mécréants » dans un « carré » aménagé à cet effet. Les pratiques exclusives et discriminantes ne servent pas seulement à séparer les « mécréants » de la communauté des croyants. Elles s’appliquent à l’intérieur même de la communauté, par exemple dans les mosquées, où les femmes sont séparées des hommes quand elles ont la chance de s’y trouver tolérées.

Si les activistes hijabis s’opposaient sincèrement aux discriminations et aux exclusions, elles commenceraient par lutter pour changer leur propre communauté et leurs propres institutions. Mais en réalité, ce sont nos institutions et nos communautés qu’elles veulent changer, tout en se gardant le droit de nous exclure et de nous discriminer comme bon leur semble. Si une femme voilée vient se plaindre auprès de vous des discriminations qu’elle subit (censément), commencez donc par lui demander si elle accepterait après sa mort d’être enterrée à côté d’une tombe juive ou chrétienne, ou si elle tolérerait qu’une de ses sœurs se marie avec un non-musulman.

La neutralité pas neutre des Belges

Nous connaissons tous la parabole de la paille et de la poutre. Assez parlé de la rhétorique faussement inclusive des activistes hijabis ! Dénonçons plutôt la « neutralité » partiale de l’État belge. On peut penser tout le mal qu’on veut du hijab, mais les activistes voilées marquent un point quand elles dénoncent une neutralité pas neutre qui « vise les femmes portant le foulard, même si d’autres minorités peuvent être aussi atteintes ». Bizarrement, avant l’arrivée et l’implantation massive de populations musulmanes sur leur sol, les Belges n’étaient pas à ce point obsédés par cette fameuse « neutralité » de l’État. Tout le monde comprenait implicitement que cette neutralité se bornait à l’appareil d’État et n’avait pas vocation à empiéter sur la société au prétexte que plusieurs de ses institutions seraient financées sur fonds publics.

Ce n’est que depuis l’apparition dans l’espace publique d’une identité islamique assertive que les Belges se sont retranchés derrière une redéfinition toujours plus extensive de ladite neutralité pour limiter l’islamisation de leur pays sans se faire accuser de racisme ou « d’islamophobie » (sic). C’est une stratégie de pleutres et de perdants qui ne trompe personne, à commencer par les premiers concernés – les musulmans sunnites orthodoxes, qui sont effectivement plus visés que les autres par cette pseudo-neutralité. La prochaine fois qu’une bourgeoise MR vous explique que le port du voile dans les établissements d’enseignement supérieur contrevient à la sacro-sainte neutralité de l’État (en répétant toutes les trois phrases qu’elle n’est « évidemment pas raciste »), demandez-lui en quoi le pantalon (symbole d’émancipation féminine au début du siècle passé) ou la mini-jupe (symbole de la libération sexuelle dans les années 60) qu’elle porte serait plus « neutre » que le hijab.

La vérité, c’est que nos vêtements ne sont jamais neutres, n’en déplaise à notre Constitution. Nos vêtements véhiculent des valeurs et un idéal, autrement nous ne mettrions pas autant d’application à nous habiller de manière « appropriée » en prêtant une attention particulière aux circonstances sociales. Au lieu de nous arc-bouter sur une neutralité hypocrite, osons interroger ouvertement les valeurs et l’idéal que véhicule le hijab, sans crainte de nous voir taxer de racisme (c’est déjà le cas de toute façon). Peu importe la signification idiosyncratique que peut prêter au voile islamique telle ou telle hijabi individuelle. Ce qui nous intéresse – et nous révulse, c’est la signification sociale du voile ; sa fonction symbolique de démarcation dans l’espace publique. Et pour saisir la signification du voile islamique, il n’y a pas de meilleure source que les textes religieux, en particulier ceux avancés par les militants pro-hijab eux-mêmes.

La culture du voile est une culture du viol

Sourate 24, versets 30 et 31 : « Dis aux croyants qu’ils baissent leurs regards et gardent leur chasteté. C’est plus pur pour eux. […] Et dis aux croyantes qu’elles baissent leurs regards, qu’elles gardent leur chasteté, et qu’elles ne montrent de leurs parures que ce qui en paraît, et qu’elles rabattent leur voile sur leur poitrine ; et qu’elles ne montrent leurs parures qu’à leur mari, ou à leur père […] »

Le voile sert donc à préserver la pureté et la chasteté des croyantes, et implique donc logiquement que les femmes non voilées ne sont ni pures ni chastes.

Sourate 33, verset 59 : « Ô Prophète ! Prescris à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de serrer sur elles leurs “mantes”. Cela sera le plus simple moyen qu’elles soient reconnues et qu’elles ne soient point offensées. »

Le voile sert également aux musulmanes à se faire « reconnaître » afin de ne pas être « offensées », « l’offense » étant donc le sort réservé aux femmes non-voilées, celles-là mêmes qui – suivant la logique des versets précités de la sourate 24 – ne sont ni « pures » ni « chastes ». Selon l’islamologue Rachid Benzine, que personne ne soupçonne « d’islamophobie », le voile permettait de distinguer entre les femmes de condition libre et les esclaves dans la société islamique du VIIIᵉ siècle.

Et aujourd’hui ? Le voile sert à distinguer entre les femmes musulmanes, pudiques, « modestes » comme ils disent, et donc mariables, et les autres, les mécréantes, censément impudiques et immodestes, donc baisables, violables et jetables. C’est la fonction sociale effective du voile, n’en déplaise à toutes celles qui clament, la main sur le cœur, ne pas vouloir l’imposer et ne le porter que pour plaire à Allah. En réalité, nous n’avions pas besoin de nous référer aux textes pour le savoir, car nous le comprenons d’instinct et par expérience. C’est notoirement dans les quartiers fortement islamisés que les non-musulmanes n’osent plus passer en robe légère, de peur de se faire suivre et harceler, et ce n’est pas un hasard. Dans les quartiers de l’État islamique, les femmes « modestes » – complices de leurs djihadistes de maris et voilées des pieds à la tête – maquillaient les esclaves sexuelles qui, elles, n’avaient aucun voile derrière lequel se protéger, et ce n’est pas non plus un hasard. Et nous le savons. Alors arrêtons de tourner autour du pot et soyons francs, nous le devons à nos concitoyens pro-hijab. Faisons tomber le masque hypocrite de la « neutralité », et disons-le clairement, une bonne fois pour toutes : la culture du voile est une culture du viol, et c’est pour ça que nous n’en voulons pas. Tout simplement.

Nicola Tournay