La Belgique se déchire depuis des jours sur la question du contenu du guide pour l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle, l’EVRAS. Une nécessité absolue pour les uns. Une abomination pour les autres. En réalité, comme pour tout guide, tout est question de contenu. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que celui de l’EVRAS version 2023 pose question… sauf pour les élus qui l’ont adopté à la quasi-unanimité.
Comme toujours, notre pays qui se veut à la pointe du progressisme se retrouve épinglé à l’international pour ses sérieuses dérives sur plan éthique. Et comme notre espace médiatique est saturé par l’idéologie progressiste dominante, il faut se tourner vers l’étranger pour entendre la voix des opposants rationnels à ce texte. En Belgique, ils sont niés, injuriés et ramenés au mieux au rang de complotistes, quand ce n’est pas à celui de nazis. C’est donc vers la France, où l’univers médiatique dispose de quelques ondes de résistance, qu’il faut se tourner pour entendre les critiques étayées de l’EVRAS. Le Dr Sophie Dechêne, pédopsychiatre et co-fondatrice de l’Observatoire des discours idéologiques sur l’enfant et l’adolescent (La Petite Sirène) a porté l’affaire devant les tribunaux via son conseil, Me Aymeric de Lamotte. Elle a exprimé ses critiques au micro d’André Bercoff sur Sud Radio.
Probablement dépassés par le volume d’un document de plusieurs centaines de pages, nos élus francophones ont voté, à trois gentilles abstentions près, en faveur d’un texte qu’ils n’ont certainement pas pris la peine d’examiner avec l’attention requise pour un enjeu aussi crucial dans l’éducation de l’ensemble des jeunes francophones.
Portés par le vent du wokisme et du transactivisme qui souffle sur nos social-démocraties, ils ont avalisé sans broncher des éléments qui posent réellement question sur les plans éthique mais aussi politique. Ils sont tellement pétris de certitudes quant à leurs petites stratégies communicationnelles qu’ils sont passés à côté du problème politique que soulève l’EVRAS.
En atteste par exemple le spectaculaire revirement du PTB qui après avoir voté en faveur du texte se met subitement à émettre quelques réserves après que l’électorat qu’il convoite se soit déchaîné contre le contenu du guide. Gouverner, c’est prévoir. Les questions, les objections, c’est avant le vote. L’inverse n’est qu’une pitoyable tentative de rattraper un électorat qui menace de filer… et qui, soyons honnêtes, est résolument perdu.
En tentant de faire rentrer de force la théorie du genre dans l’enseignement obligatoire, les élus sont passés totalement à côté du refus catégorique d’une large part de la société d’adhérer à ce type d’idéologie. Quelle erreur magistrale ! Que d’années de labeur pour conquérir des électorats de niche mises à mal en un seul vote pris dans la précipitation !
Ces gouvernements qui se succèdent en structurant leur pouvoir autour d’une tyrannie des minorités ont été incapables de percevoir les incompatibilités pour ne pas dire la polarisation entre certaines d’entre elles. Après avoir réussi à solubiliser le « halal » dans le « végétarianisme », la voie semblait toute tracée pour cette masse d’élus qui prospèrent sur la fracturation de la société en petites entités cajolées dans leur extrémisme.
Aujourd’hui, la somme de leurs incohérences menace d’ébranler leur modèle de gouvernance. Ils pensaient avoir acheté à jamais les voix de la diversité ethnique à coup de laxisme socio-économique et migratoire. Ils ne comprennent pas comment ni pourquoi les populations allochtones pour qui ils ont taillé des politiques sociales sur mesure (regroupement familial, condition d’octroi des logement sociaux, voile…) osent s’opposer à leurs décisions de nature sociétales ! Aux Etats-Unis, le réel reprend ses droits sur le terrain local.
Faut-il expliquer aux élus qu’ils ne sont que locataires de leurs mandats ? Faut-il leur rappeler que tout ne s’achète pas ?
A vrai dire, la crise EVRAS a tout d’un sketch anthropologique, si propice, une fois le rire dépassé, à virer au pogrom. Nos élus qui ont laissé prospérer le radicalisme sous toutes ses formes commencent doucement en faire aujourd’hui les frais. Ceux qui ne cessent d’affirmer que le voile n’est pas un vêtement religieux sont aujourd’hui conspués dans une manifestation qui rassemble une très large majorité de femmes voilées. Difficile de soutenir qu’il s’agit de catholiques, même pas intégristes. Etrange accoutrement pour des « antivax » qu’ils qualifient volontiers de complotistes.
Politiquement, les choses sont bien plus mal engagées que ne l’imaginent nos mandataires. Ils ont allumé des mèches et sont assis sur un baril de poudre. Ils prouvent aujourd’hui qu’ils peuvent fédérer la société contre eux en offrant l’occasion à des athées épris de liberté, à des catholiques pratiquants (ou pas) et à des musulmans intégristes (mais pas que) de dénoncer, chacun à leur manière (plus ou moins violente), un texte sournois qui livre la santé mentale de nos enfants en pâture aux activistes du genre. Empocher la timbale du vote LGBTQIA+ qui a ouvert des franchises auprès de la plupart des partis n’autorise pas tout.
Pour ce qui est du contenu d’EVRAS (dont la lecture du texte dans son intégralité vaut la peine), on retiendra de façon non exhaustive quelques passages interpellants.
Ainsi, à la page 73 on peut lire « En effet, il a été montré que la conscience et la personnalité de l’enfant sont assez fragiles autour de l’âge de 4 à 6 ans et que celles-ci sont basées sur les images parentales. Il faut donc montrer aux enfants qu’il y a d’autres types de structures familiales que celles qu’ils·elles·iels connaissent (monoparentales, homoparentales, recomposées, sans enfant, …). ». Question : Est-ce que 4, ou même 5 ou 6 ans est un âge adéquat pour aborder la question de l’homoparentalité et donc celle de l’homosexualité voire même celle de la reproduction sexuée ?Au passage, admirons le soin et l’encre dépensés en écriture inclusive par ces auteurs-serviteurs d’une idéologie qui oeuvre à la grande croisade du genre.
A la page 102, l’EVRAS propose de faire découvrir l’anatomie et la reproduction sexuée à des enfants à partir de 5 ans. Comment ne pas prendre le risque de traumatiser un enfant de cinq ans en lui expliquant le processus assez « gore » de la grossesse qui se termine tout de même par un accouchement dans un bain de sang… ? Il y a cinquante ans, on préférait raconter un joli mensonge (pas plus dommageable que celui du Père Noël) aux enfants en expliquant que les filles naissent dans les roses et les garçons dans les choux. Ces générations d’enfants auxquels on a menti avec bienveillance n’en n’ont pas souffert dans leur sexualité à l’âge adulte. Quelle utilité pour un enfant de 9 à 11 ans de pouvoir situer un scrotum ou le gland d’un clitoris ou à devenir incollable en matière d’intersexuation ? Comment ne pas comprendre l’inquiétude des parents et d’une portion non négligeable du corps enseignant ou des professionnels de l’enfance face à telle offensive idéologiquement orientée ?
En définitive, EVRAS est le symptôme d’une société profondément malade, à la fois atteinte dans les valeurs qu’elle entend imposer par le biais d’une propagande ciblant les plus jeunes et dans son fonctionnement de moins en moins démocratique. Instrumentaliser à ce point les enfants est la marque de fabrique des régimes totalitaires. Toute critique à l’encontre d’EVRAS vaut à son auteur une mise au ban visant sa déchéance sociale et professionnelle. Il ne s’agit pas d’un manuel d’éducation sexuelle, mais dun guide de rééducation qui confisque aux parents le droit d’éduquer leurs enfants dès le plus jeune âge. Rares sont les dictatures qui plongent aussi profondément dans l’intimité des familles!
Qui pour croire que le transactivisme, le platisme, ou le veganisme hard core sont miscibles dans la démocratie libérale ?
La caste de politiciens confortablement installée dans ses institutions ronronnantes? Non, ils jouent la montre en sachant que tôt ou tard le volcan autour duquel ils dansent va exploser.
Les auteurs de ce genre de guide peut-être ? Ceux que nos gouvernements entretiennent pour construire le narratif du « mieux vivre ensemble dans la sobriété » à travers des guides et recommandations toujours plus délirants et déconnectés du réel sont certainement les seuls à croire au bienfondé de leurs inepties. Ils sont sélectionnés, rémunérés et parqués dans l’administration ou les ONG à cette fin.
Sur la question précise de l’EVRAS, l’attitude de nos parlementaires fait la triste démonstration de leur inutilité car on peine à croire qu’un texte qui divise autant la société et la communauté scientifique ne suscite aucune opposition au sein des élus. Trois abstentions à peine… Quel exécutif ne rêverait d’avoir des parlementaires aussi dociles!
Dès lors, il ne reste que deux explications plausibles à cette unanimité de façade :
a) Nos représentants n’ont rien vu de polémique parce qu’ils n’ont tout simplement pas lu le texte dans son intégralité et sont passés totalement à côté du contenu;
b) Nos représentants ont parfaitement identifié les passages polémiques et ont préféré ignorer leur conscience pour obéir à leur président de parti respectif en espérant figurer en bonne place sur les listes lors des prochaines élections qui approchent à grand pas.
Et la volte-face du PTB de renforcer cette hypothèse;
Paresse ou lâcheté, à moins que ce ne soit les deux ? A vous de choisir, aux prochaines élections…
T.H.