COVID 19: l’évaporation de nos libertés individuelles

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COVID 19 : l'évaporation de nos libertés
COVID 19 : l'évaporation de nos libertés - Pexels

Le temps de la pandémie est suspendu. Nous sommes entre deux mondes. Le monde “d’avant” n’est plus et celui “d’après” se profile à l’horizon avec toutes ses limites attentatoires à nos libertés fondamentales. Que faut-il redouter  à l’avenir? 

L’œuvre de l’immense écrivain autrichien Stefan Zweig, né à Vienne en 1881 et décédé à Pétropolis (Brésil) en 1942, est extrêmement  riche, foisonnante et éclectique.  Elle comprend non seulement ses nouvelles et romans (parmi les plus connues, citons notamment: ‘Lettre d’une inconnue’, ‘La confusion des sentiments’, ‘Amok’ ou encore ‘Vingt-quatre heures de la vie d’une femme’), mais aussi des pièces de théâtre ou des biographies consacrées par exemple à Marie-Antoinette, Magellan ou encore Emile Verhaeren. 

L’éloge de son œuvre serait pourtant lacunaire si l’on passait sous silence son chef d’œuvre autobiographique ‘ Le monde d’hier. Souvenirs d’un Européen’, dans lequel Zweig décrit, plein d’une nostalgie mêlée à une amertume douce-amère,  sa Vienne d’avant 1914, celle où la ville impériale pouvait vaquer, largement insouciante et pleine d’assurance, à ses passions culturelles, au premier rang desquelles bien évidemment la musique. Ce monde, partiellement enchanteur, partiellement rêvé, s’est évaporé. Il n’existe plus désormais. Seul subsiste le gâchis de 1914 et ses redoutables conséquences, dont l’Europe peine encore à se relever aujourd’hui. 

La nostalgie d’une certaine normalité

Toute proportion gardée, il ne serait pas étonnant que la population européenne contemporaine, belge et française en particulier, matraquée par une couverture médiatique et gouvernementale volontairement anxiogène, éprouve un sentiment nostalgique similaire. 

Evaporées nos libertés fondamentales si chèrement acquises et finalement si peu défendues, parmi lesquelles la liberté d’aller et venir librement, y compris dans son propre pays (le couvre-feu instauré en Belgique, notamment, est littéralement une mesure de guerre, qui apparaît en réalité disproportionnée et difficilement justifiable) ou encore celles de commercer et de se réunir; évaporées également nos libertés de conscience, de choix et d’expression (l’idéologie absurde du ‘politiquement correct’, déjà insupportable en soi, a très largement passé le relais à la ‘cancel culture’, qui n’est que la preuve manifeste que toute expression ou manifestation, d’ordre artistique, culturelle ou intellectuelle ‘à contre-courant’, doit non seulement être combattue, souvent avec violence, mais surtout détruite, annihilée et anéantie. C’est en somme le refus de tout débat démocratique et libre et, en fin de compte, la preuve de la défaite idéologique de la gauche) ; évaporé enfin le respect d’une certaine vie privée, protégée de toute intrusion étatique inutile et disproportionnée. 

Ainsi, la pandémie de la COVID-19 a permis et surtout facilité, grâce à la complicité active et malveillante de nos ‘élites’ politiques, la fin de notre monde, tel que nous l’avons connu et conçu. 

Si certains intellectuels ou hommes politiques ont rêvé, au moment de l’émergence de la pandémie de la COVID-19, à un monde ‘d’après’ largement idéalisé et fantasmé, la population européenne dans sa globalité n’aspire, quant à elle, qu’à un retour à une normalité certaine, marquée par la levée des limitations, interdictions et sanctions en tous genres. 

Un dur retour à la réalité… 

Pourtant, en dépit de la campagne de vaccination actuellement en cours, les chances et perspectives d’un retour pur et simple au monde ‘d’avant’ semblent largement illusoires: nos libertés fondamentales ne nous seront, très vraisemblablement, pas rendues à l’identique; au mieux, elles nous seront échangées contre nos ‘data’ personnelles – notamment médicales-  nouvelle mine d’or à accaparer et rentabiliser. Le deal risque donc d’être : libertés v. données. 

Si tel devait effectivement être le cas, nos gouvernements européens réaliseraient, exécuteraient et consacreraient le même programme que celui, dictatorial et totalitaire, mis en œuvre notamment en Chine, à savoir le fichage et le traçage (notamment par des techniques de reconnaissance faciale à une échelle démesurée) de chacun des citoyens européens, dans chacun de ses aspects de la vie, et ce sans que la Chine n’ait eu à brandir la moindre menace économique ou militaire. 

Le risque de basculer dans un tel monde orwéllien est bien réel, tant se multiplient les initiatives inquiétantes. 

Echange portion de libertés contre pack de data

Ainsi, à l’échelle européenne, la Commission, loin de faire profil bas,  entend au contraire, mais sans l’exprimer clairement, subordonner et conditionner nos déplacements intra-européens dans l’espace Schengen à la fourniture d’informations sur notre état de santé; cette velléité prendra vraisemblablement la forme d’un carnet ou certificat vaccinal (le terme ‘passeport’ semble quant à lui proscrit, tant il porte en lui le germe de ses limitations et interdictions), de préférence vert (en toutes occasions et à propos de n’importe quel sujet, il importe d’établir un lien avec la cause climatique. A cet égard, on attend avec délice la prochaine initiative de la Commission, relative cette fois à l’établissement d’un carnet nutritionnel, lequel établira la consommation hebdomadaire de fruits et légumes de chaque citoyen européen).  Il est vraisemblable que ce projet se transformera tôt ou tard en une énième usine à gaz, dont les institutions européennes ont le secret. Plus généralement, la Commission, souhaitant tirer les leçons de l’’OpenLux’ (concernant le registre des ‘bénéficiaires effectifs’ en matière fiscale) et poussée dans le dos par certaines ONG, entend ouvrir un nouveau chantier législatif sur les « données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public » ; concrètement, ce projet vise à mettre à disposition du plus grand nombre « les données détenues par le secteur public, pour qu’elles puissent être utilisées pour de la recherche, du journalisme, l’éducation ou même développer des applications pour le téléphone. » (source: ‘Le Soir’ du 12 mars 2021, page 14). Le même journal nous apprend ainsi que « les Européens ont défini une liste des catégories de données si importantes pour la société qu’elles devraient bénéficier de cet accès sans restriction: les informations géo-spatiales, d’observation de la Terre et de l’environnement, météorologiques, les statistiques, les données sur la mobilité et les données sur les entreprises et sur la propriété des entreprises.»

En Belgique aussi, sous couvert de la COVID-19, a existé la volonté (le Secrétaire d’Etat à la protection de la vie privée, M. Mathieu Michel, a annoncé l’abandon du projet il y a quelques jours) de croiser massivement les données de plusieurs services publics (en matières de fiscalité, santé, justice, etc.), en vue d’offrir une « vision globale sur les citoyens et les entreprises » (source: ‘Le Soir’ du 10 mars, pp.2 et 3). A qui ? A quels desseins ? Pour identifier les profils ‘déviants’ ? A ce stade, l’objectif de ce projet, mis en sourdine dans l’intervalle et à la réalisation duquel l’ASBL ‘Smals’ aurait joué un rôle indispensable,  restait volontairement flou, mais a porté le nom évocateur ‘Putting Data at the Centre‘.  

Face à l’odieux marchandage qui se profile à l’horizon, où les citoyens européens seront obligés de céder ce qui leur appartient (leurs données personnelles) en échange de l’exercice, peut-être moins étendu, de leurs libertés fondamentales auparavant largement acquises, il n’est pas certain que les régimes dits démocratiques sortent grandis aux yeux de leur population nationale. Tel est sans doute le prix à payer pour mettre en œuvre les diktats législatifs de la Commission. 

Gaëtan Zeyen