C’est la civilisation qu’il faut sauver, pas la planète

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F*ck climate crisis
Photo de Markus Spiske provenant de Pexels

Naïfs, nous pensions que la menace imminente et concrète du coronavirus nous délivrerait de la menace lointaine et diffuse du changement climatique. Mieux, nous pensions que le traumatisme économique du confinement enterrerait définitivement le projet d’austérité énergétique que veulent nous imposer les partis et les lobbys écologistes. Et pendant un court instant, nous y avons presque cru : dans les médias, les infectiologues – ces stars du « nouveau monde » – avaient détrôné Greta Thurnberg. Sur les réseaux sociaux, tout le monde y allait de son petit mème pour se moquer des militants verts contents de voir la planète « enfin respirer » grâce à la réduction drastique de l’activité humaine consécutive au lockdown.

Las. À mesure que le nombre des décès imputables au coronavirus décroissait, notre manie des chiffres s’est à nouveau reportée sur les températures, qui devraient augmenter de deux degrés, ou de trois, dans vingt ans, ou dans cinquante. Je ne sais plus. En fait, je m’en contrefiche. Le problème, c’est qu’on n’a même pas le droit de s’en foutre. On nous le gueule, sur un ton catastrophé, à la radio, à la télé, dans les journaux, partout, tout le temps, sans répit : le changement climatique est une menace mondiale. Donc nous sommes tous concernés, non ? Non. En fait, ça dépend de quel monde on parle.

Mon monde, c’est la civilisation européenne. Mon monde, c’est la Grèce mythique d’Homère, c’est la Rome républicaine de Cicéron, c’est le Moyen Âge galant des chevaliers, c’est le miracle de la Révolution Scientifique et le triomphe des Lumières. C’est une mémoire que l’on transmet, c’est une Histoire que l’on devrait vouloir continuer. Dans mon monde, le doute supplante le dogme, la raison dissipe les superstitions puis se fait remettre à sa place, les femmes sont autre chose que des utérus sur pattes, et les hommes ne se distinguent pas seulement par la force physique, mais par le talent, et par l’humour surtout. C’est un monde idéal, qui n’a jamais vraiment existé, mais qu’on essayait d’atteindre, et nous pouvions toujours nous retourner pour regarder avec fierté tout le chemin parcouru. Mais plus maintenant.

Maintenant, il faut vandaliser les statues, déboulonner les monuments, censurer les films, bientôt brûler des livres, brimer les libertés en commençant par la plus importante d’entre toutes : la liberté de s’exprimer. Maintenant, il faut faire acte de contrition : il faut s’agenouiller, se flageller, s’excuser pour le racisme, le colonialisme, expier tous les maux de l’humanité, pour finalement se soumettre, comme le prévoit Michel Houellebecq. C’est mon monde que l’on est en train d’immoler, et ce sont les « gauchistes » de toutes les variantes et de toutes les couleurs – des « rouges » donc, mais aussi des « verts » – qui lui boutent le feu, torche à la main. C’est ce monde dont j’ai hérité qu’il m’importe de sauver, tant qu’il en est encore temps, en protestant contre le régime multiculturel liberticide qui fait le lit de l’islamisme et de l’indigénisme. Et si de ce monde il ne reste plus que des cendres, alors la planète peut bien brûler, car pour moi il n’y aura déjà plus rien à sauver.

Je ne lèverai pas le plus petit doigt pour sauver un monde de bidonvilles islamisés où on caillasse les homos et les femmes trop libres, et où tous les hommes, ou presque, portent le même prénom et lisent le même et unique livre. Je m’en fous de sauver un monde qui n’est pas reconnaissable, un monde dans lequel je ne me reconnais pas. Un monde qui n’est pas le mien, et vis-à-vis duquel je ne me sens aucune obligation, aucune responsabilité. Que les choses soient bien claires, je ne hais ni l’humanité ni la planète. Mais je ne les aime pas non plus, en tous cas pas au point de faire les sacrifices énormes qu’exigent les écologistes. Du moins, j’aime la première quand elle est civilisée, et la seconde quand elle est domestiquée, et puisqu’à mes yeux toutes les civilisations et toutes les domestications ne se valent pas, cela veut dire que j’aime l’Europe avant tout. Et le jour où les écologistes mettront autant d’énergie à sauver notre culture et nos libertés qu’ils en mettent à « sauver le climat » (whatever that means), je daignerai peut-être les écouter.

Nicola Tournay